La bataille du yuan
Dans le système monétaire international, c'est LE grand enjeu des dix prochaines années. Lentement, mais sûrement, la devise chinoise est en train de s'ouvrir au monde. Et cette perspective aiguise l'appétit de toutes les grandes places financières. Depuis 2009, de concessions en réformes, Pékin enchaîne en effet les petits pas pour que sa monnaie circule davantage en dehors de la Chine et des zones frontalières : elle a rendu son régime de change plus flexible, elle a permis à ses entreprises d'utiliser le yuan lors de transactions avec des sociétés étrangères, elle a développé le marché obligataire dans la devise chinoise… Résultat, le yuan a fait son apparition dans le palmarès des dix devises les plus échangées, avec une part de marché triplée en trois ans. On est loin de la pleine convertibilité, encore plus loin de l'accession au statut de « monnaie de réserve ». Mais la route est toute tracée. Car les autorités chinoises savent qu'il leur faut moderniser et libéraliser leur système financier pour atténuer leur dépendance au dollar. Cette internationalisation du yuan donne lieu à une compétition intense entre les places financières qui veulent en bénéficier. Hong Kong est naturellement en première ligne. Londres est bien placée, qui capte déjà plus de 40 % des volumes sur les marchés des changes. Mais Paris a aussi des atouts à faire valoir : la présence de ses champions nationaux en Chine, l'activisme de ses banques, la qualité de sa technostructure financière... Elle peut aussi capitaliser sur ses liens avec l'Afrique pour faire de la France une plaque tournante des échanges commerciaux entre le continent noir et la Chine. Sachant qu'il n'y aura pas de bonne coopération sans réciprocité. En clair, la place de Paris n'aura sa part dans la « bataille du yuan » que si, et seulement si, la France consent à s'ouvrir davantage aux investissements chinois sur son sol. Ce qui suppose un vrai changement de mentalité.